Portraits

Tuilier de père en fils

Qui a peur du grand méchant loup ? C’est pas vous, c’est pas vous, car votre maison, certes, a des murs en brique mais aussi une couverture qui ne craint aucune fêlure. Ça, vous pouvez le dire, c’est la tuile ! Ce matériau dérive du mot latin tegere qui signifie « couvrir » et grâce à lui, vous ne craignez pas que le ciel vous tombe sur la tête. Mais comment est-il fabriqué, et par qui ?

A Cézac, petite commune située à une trentaine de kilomètres de Bordeaux en Gironde, trois générations se sont succédé pour faire prospérer ce savoir-faire hérité du grand-père, qui a racheté en 1954 l’entreprise créée vers 1850. Petit à petit, l’affaire a grandi. En 1959, a été construit le premier four tunnel, d’autres opérations ont été mécanisées.

Aujourd’hui, le petit-fils, Xavier Joyat, est à la tête d’une petite usine, qui fait travailler deux salariés. Chaque année, près d’un million de tuiles sont produites, à destination d’une clientèle professionnelle mais aussi particulière, principalement en Gironde, en Charente-Maritime et dans les Deux-Sèvres. Visite guidée de la chaîne de fabrication.

 

Terre cuite

La matière première est issue de nos terres : les tuiles sont fabriquées à base d’argile brute, extraite sur place ou provenant de carrières proches, puis mélangée à de l’eau. Cette pâte est ensuite passée dans une “extrudeuse” : l’extrusion est un procédé de fabrication mécanique par lequel un matériau compressé est contraint de traverser une filière ayant la section de la pièce à obtenir. On forme en continu un produit long et plat. Les tuiles sont ainsi façonnées, avant de reposer, pour sécher, au moins une journée.

L’étape clé est la cuisson, à 1050 °C pendant environ deux jours. Un procédé qui a finalement l’air très simple, mais méfiez-vous des apparences ! « La terre cuite, c’est très compliqué à doser, souligne Xavier Joyat, en fonction par exemple de l’humidité dans l’atmosphère. » En bout de chaîne, on teste la solidité de chaque pièce « en la faisant sonner. Vous l’entendez quand ça sonne creux ». Certaines vont même jusqu’à casser. Mais la majorité sont validées, prêtes à prendre la direction de leur nouvelle maison.

A chaque région, sa particularité : dans le Sud de la France, c’est la “tuile canal”, fabriquée par la famille Joyat. Appelée aussi “tuile ronde”, “creuse” ou “tuile méditerranéenne”, elle s’inspire des formes et surtout de l’aspect, une fois posée, des tuiles romaines telles qu’on peut encore en voir sur les toitures des vieux quartiers des villes italiennes. Au naturel, une fois cuite, la tuile en terre cuite ressort rose, « une teinte très appréciée notamment sur l’île de Ré ».

 

 

 

 

La tuilerie joyat four paves bordelaispetite entreprise résiste

Après plus de soixante ans d’existence, la tuilerie Joyat vient de racheter la société les Grès de Gascogne, au Barp en Gironde, spécialisée dans les pavés urbains, très prisés par Bordeaux métropole. Proposant déjà du carrelage, en faible quantité, cette acquisition lui permet de se diversifier.

Quand Xavier Joyat a pris la suite de son père il y a une dizaine d’années, il était directeur de travaux dans une entreprise de travaux publics. A 40 ans, il a eu envie de préserver le patrimoine familial et s’est formé sur le tas. « Aujourd’hui, nous sommes encore là ! », déclare-t-il fièrement. La petite entreprise fait de la résistance dans ce milieu gagné par les grands groupes industriels, en alliant tradition et modernité.

Les pavés bordelais ont leur propre four. Même technique de cuisson que pour les tuiles, à une température légèrement plus élevée : 1 200 degrés